"Petit déjeuner au crépuscule" - Philip K. Dick

Un petit livre à 2 euros, cela s'achète presque les yeux fermés. En tout cas c'était l'occasion de renouer avec Philip K. Dick, un bon auteur de SF qui ne m'a pas toujours convaincu. Ceci dit, cette fois, j'ai vraiment apprécié de bout en bout.


+++ La quatrième de couverture +++

Imaginez que, au moment où vous ouvrez la porte pour emmener vos enfants à l'école, des soldats armés jusqu'aux dents fassent irruption dans votre cuisine. Dehors, à la place de votre petite ville riante, il n'y a qu'immeubles en ruine et gravats... Prendre un petit déjeuner avec Philip K. Dick n'est pas sans danger. Qui sait ce que vous réserve le reste de la journée?


+++ Mon avis +++

Les trois nouvelles qui composent ce court recueil sont issues du livre "Paycheck", ouvrage disponible en Folio SF.

Le premier texte, "Petit déjeuner au crépuscule" nous plonge dans un monde uchronique. Uchronie sans l'être... Encore que! C'est le matin d'une journée comme toutes les autres. Tim McLean prend son petit déjeuner avec ses enfants de manière un peu pressée juste avant de conduire les enfants à l'école puis d'aller travailler. Sauf que derrière la porte se trouve des soldats. De fil en aiguille, on réalise qu'une guerre a eu lieu entre les USA et les Russes. On est en 1980, et des Etats-Unis d'Amérique il ne reste que des cendres à peu de chose prêt. Sauf la maison de Tim qui est intacte ou presque. Hallucinant! Comment est-ce possible? Que c'est-il passé? Bon, n'en disons pas trop, ce serait dommage. Toujours est-il que ce sympathique petit texte a un bon goût d'uchronie mâtiné de post-apocaliptique.

"Une petite vile" est un peu plus incidieux. Verne Haskel est un brave gars. Le genre de type discret pour qui la vie n'est que boulot et repos à la maison. Quand il est chez lui, il s'occupe de son train électrique. Pour celui-ci, il a reconstruit entièrement sa ville, pièce par pièce, lieu par lieu, tout à l'identique. Mais Verne en a marre, tout bascule, il jette son boulot et décide de tout changer. Alors pour influer le monde, que lui reste-il? La seule chose sur laquelle il a une influence : sa maquette de la ville. Détruire son univers réduit pour le reconstruire à sa manière... et alors le monde va changer avec ce qu'il réalise. Une fois de plus arrive le questionnement de Philip K. Dick sur la réalité de ce qui nous entoure, celle-ci n'étant qu'une représentation de notre esprit. En bref, rien ne serait réellement réel. Cela donne un petit côté caverne de Platon sous LSD et paranoïa, non? Ceci dit, cela marche très bien et j'aime beaucoup!

Le troisième et dernier texte, intitulé "Là où il y'a de l'hygiène" aborde le thème de la liberté de penser. Un homme, Don Walsh, est tiraillé entre les deux avis qui dirigent l'état actuel des choses. D'u côté il y'a les naturalistes, ceux qui revendiquent leur nature, leurs odeurs, leur transpirations, leurs productions corporelles. De l'autre, il y'a les puristes qui sont l'exacte contraire, sorte d'intégriste hygiéniste. Inévatiblement, Walsh doit choisir son camp. Il ne veut pas... s'en suivra pour lui des rencontres difficiles et des déboires à gérer. Faut-il, avec cette histoire, faire un parallèle avec la politique américaine où il n'y a que deux camps? Un pays où l'on est soit de l'un, soit de l'autre mais où il n'existerait dès lors aucune place quelque part au milieu ou ailleurs? Doit-on aussi y voir le côté gauchiste de Philip K. Dick, ce courant qui n'existe pas réellement en politique américaine?

Bref, ce recueil fut pour moi un réel plaisir. Une nouvelle incursion dans l'univers déroutant de Philip K. Dick. Un bon auteur de SF qui a pondu de très bon texte au niveau réflexif, mais qui en a pondu des mauvais comme des bofs. Tout tient pour moi essentiellement dans ces idées plus que son style. Non? Ce qui est certain, c'est que ces trois nouvelles m'ont donné envie de relire du Philip K. Dick, un auteur que j'avais un peu rangé aux oubliettes tant il peut être déroutant.


+++ Mais encore +++
7ème lecture pour le challenge Fin du Monde :

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Première lecture pour le Winter Time Travel Challenge, édition 2011-2012, défi littéraire qui a pour thème l'uchronie.

Les autres billets de ce Challenge (y compris l'édition précédente)
Le billet du RSF blog qui a lancé ce Challenge





+++ Le livre +++
  • Broché: 108 pages
  • Editeur : Gallimard (2 septembre 2010)
  • Collection : Folio 2€
  • Traductions : revues et corrigées par Hélène Collon
  • Illustration : Alan Sirulnikoff
"Petit déjeuner au crépuscule" - Philip K. Dick "Petit déjeuner au crépuscule" - Philip K. Dick Reviewed by Julien le Naufragé on jeudi, janvier 12, 2012 Rating: 5

5 commentaires:

  1. Hélas, Philip K Dick est souvent desservi par une traduction hâtive... comme beaucoup d'auteurs de SF publiés directement en poche chez nous.
    Généralement, ceux issus de la défunte collection "Présence du futur" (Denoël) tiennent mieux la route, ainsi que ceux de chez Robert Laffont, en "Ailleurs et demain". La plupart sont resservis en poche chez Folio SF.

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  2. @ Marcel Trucmuche : Ici justement j'ai senti la traduction de bon ton. Elle a été revue et corrigée ici, ce qui est le bienvenu. Par contre, dans les vieux livres d'okkaz, cela passe pas toujours bien. Je regarderai en présence du futur. Sinon Folio fait l'effort des revues de traductions, ce qui est un réel plus. Je ne sais pas si chez J'ai Lu c'est le cas ou si c'est toujours les mêmes vieilles traductions pourries.Chez Ailleurs et Demain, je jetterai un oeil, merci du conseil.
    Des conseils de titres au passage?

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  3. J'affectionne particulièrement la "trilogie divine", et "La transmigration de Timothy Archer", son dernier. L'ouvrage de Emmanuel Carrère "Je suis vivant et vous êtes mort" aide grandement à situer le personnage, aussi. "Ubik", "Au bout du Labyrinthe", ou "Docteur Bloodmoney", quoique de traductions médiocres, valent le détour. "La vérité avant dernière aussi". Mais bon, tout ça n'est que mon avis...

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  4. @ Marcel Trucmuche : La "Trilogie Divine" me tente bien. Déjà elle est resortie sous Folio, donc parfois avec une traduction revue. Sinon en général cela passe bien chez eux. "Ubik" est déjà lu, il y'a des années. Bien aimé, mais plus aucun souvenir de la trame générale. C'est souvent le cas pour moi avec Dick, après quelque mois, cela se noie dans le brouillard. Le livre de Carrère, je vois ce que c'est, mais j'aimerais en lire plus de Dick avant de m'attaquer à ça, encore que cela peut donner des clés de lecture ou de décryptage...

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  5. C'est SURTOUT pour la trilogie divine et la fin de son oeuvre que le livre de Carrère est un étai précieux. Je me souviens avoir été ému aux larmes par la fin de la "Transmigration de Timothy Archer", arpès avoir lu le Carrère, déjà très émouvant.
    Sinon, j'ai un excellent souvenir de "Requiem pour Philp K Dick" de Michael Bishop.(http://fr.wikipedia.org/wiki/Requiem_pour_Philip_K._Dick)

    Comme pour Lovecraft, la bibliographie de Dick gagne à être mesuré à l'aune de la biographie de son auteur.

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